Lait de la Baraque : huit producteurs gèrent désormais eux-mêmes leur propre filière de production écologique

Les huit producteurs laitiers réunis en coopérative misent avant tout sur un lait de qualité au naturel

© RTBF Philippe Collette

18 févr. 2021 à 14:15 – mise à jour 18 févr. 2021 à 14:15Temps de lecture
Philippe Collette
« Le Lait de la Baraque », tel est le nom d’un nouveau produit de ferme équitable et écologique issu d’une coopérative récemment fondée par huit producteurs laitiers du sud de l’arrondissement de Verviers et du Nord de la Province de Luxembourg.

Ensemble, ils viennent de donner à leurs exploitations une tout autre orientation en quittant les laiteries avec lesquelles certains travaillaient depuis 30 ans pour la récolte et le traitement de leur lait, faute de rentabilité ; un franchissement du Rubicond mûrement réfléchi après de trop longues années de disette vu l’effondrement des prix de vente du litre de lait aux laiteries, inférieurs au prix de revient.

Depuis la mi-septembre 2020, les huit producteurs gèrent désormais eux-mêmes leur propre filière de production via une nouvelle coopérative « Pur Ardenne » et proposeront dès mars un lait naturel, le « Lait de la Baraque », allusion à la situation des huit exploitations actives dans un rayon de 15 kilomètres autour de la Baraque de Fraiture, produit selon des critères drastiques imposés aux coopérateurs sur base d’un cahier de charge.

Plus possible de travailler à perte

L’alimentation des 650 têtes que compte la coopérative est précisée dans un cahier de charge drastique © RTBF – Philippe Collette

Ils pourraient s’appeler les « 8 hommes en colère ». Huit producteurs confrontés, selon eux à la même problématique économique : « Nous étions effectivement en colère et surtout dans le doute par rapport à l’avenir de nos exploitations, explique Jean-Louis Neuville, l’un des huit producteurs à l’initiative du projet. Ici dans la Haute Ardenne, on était déjà dans une région sinistrée au niveau des producteurs laitiers ; avant, on pouvait compter 4-5 producteurs par village, aujourd’hui, c’est un producteur pour 4 – 5 villages. Nous avions un prix du lait qui n’évoluait pas au fil des années avec des charges qui ne faisaient qu’augmenter ; on finissait par travailler à perte et ne plus avoir de revenus que via les aides de la Politique Agricole Commune. »

Les huit producteurs fondent alors cette coopérative dont le but est triple : « Le premier était d’avoir la maîtrise de notre produit, donc ramener la plus-value dans la trésorerie de nos exploitations ; le deuxième but est de proposer un produit de qualité au consommateur et le troisième un produit durable dans le respect de notre région et de notre terroir. Puisque nous gérons désormais notre propre filière depuis la production jusqu’à la commercialisation, forcément, on a la maîtrise des prix, ce que nous n’avions plus. »

Un lait écologique, sans OGM, sans soja

Le projet repose donc avant tout sur la qualité du lait : écologique, durable, différent des laits courants issus des laiteries : « Le produit est d’abord nutritionnel vu l’aspect de notre terroir, précise Jean-Louis Neuville, devenu administrateur de « Pur Ardenne », qui donne une matière grasse supérieure aux zones hors pâturage ; ensuite, c’est la façon dont le lait est produit : le cahier de charge est conforme à notre environnement auquel on a ajouté des normes drastiques imposées à nos producteurs au niveau de l’alimentation des bêtes, c’est-à-dire sans OGM et sans soja ; toute l’alimentation est basée sur les fourrages de l’exploitation et les compléments régionaux. On peut parler de lait écologique dans le respect de la nature, sans oublier l’obligation de 180 jours de pâturage comme l’impose le cahier de charge. »

 

Les vaches laitières élevées dans les huit exploitations de la coopérative sont de race pis noir Holstein, « la » race laitière. © RTBF – Philippe Collette

 

Un partenaire certifié carbone neutre

Les laiteries habituelles ont fermé la porte à ce projet ; la coopérative s’est donc tournée vers un nouveau partenaire, une laiterie gérée par un agriculteur à Kruibeke, au sud d’Anvers :  » Nous avons conclu un accord de 10 ans avec ce partenaire, poursuit Jean-Louis Neuville, et toujours dans la même philosophie car cette laiterie travaille dans la durabilité ; elle est certifiée carbone neutre, la seule actuellement en Europe. »

Economiquement, la coopérative retrouve dans cet accord une marge qui, selon les exploitants, assure à nouveau la rentabilité et aussi l’avenir de ceux-ci qui pourront à terme envisager des investissements mais aussi permettre une cession de fermes saines à de jeunes producteurs pour assurer la relève.

25.000 litres de lait de la Baraque sont déjà produits tous les trois jours ; il sera invisible dans les rayons des grandes surfaces car les cartons, écologiques également, seront distribués dès mars uniquement via les coopératives de producteurs et de consommateurs de toute la Wallonie.

_rtbf